A Monsieur le
Président de la République, M. Mohamed Ould Abdel Aziz
Depuis quinze
ans, je me bats pour la réhabilitation du Lycée National. Je dédis le gros de mon
temps, en dehors des mes obligations
familiales et professionnelles, a ce combat que je crois utile a mon pays.
Notre capitale mérite, a mon avis, un grand lycée dans lequel un nombre
significatif de jeunes Mauritaniens, pas nécessairement ceux qui en ont les
moyens financiers et les dispositions sociologiques, accèdent a une éducation
secondaire de qualité. Je crois aussi que le Lycée National, de part son
emplacement, son histoire, et la place qu’il occupe dans le cœur de beaucoup de
ceux qui l’ont fréquenté, peut tout à fait jouer ce rôle. Mais une main
invisible s’acharne à le détruire comme elle l’a fait pour un autre symbole (le
lycée de Rosso) de l’école Mauritanienne postindépendance.
Je vous écris
parce que je sens que vous êtes mon dernier recours face à cette main invisible
que j’ai essayé de combattre de toutes mes forces sans succès. J’ai initié des pétitions
et organisé des rencontres pour sensibiliser sur l’importance de réhabiliter le
Lycée National dans l’espoir que des personnes d’influence, de votre entourage
ou non, prennent le sujet a bras le corps et le place au centre des priorités
de votre gouvernement. J’en ai parlé à votre Premier ministre, à vos ministres
de l’Education nationale, à des députés de votre majorité et a beaucoup d’autres
mais tous, malgré les encouragements d’usage, semblent se résigner au fait
accompli.
En 2011, sentant
la fin proche du règne de Mu’ammar al-Ghadhafi, j’ai fait circuler une pétition
demandant a votre gouvernement de dénoncer l’acte de cession du patrimoine
foncier du Lycée National a la Libye et de rétablir cet établissement dans son
domaine en rénovant ses infrastructures pour en faire, à nouveau, un pôle
d’excellence. Bien que cette pétition fût signée par un nombre important de personnalités et
d’acteurs de la société civile, elle est restée sans suite. Le gouvernement a
toutefois repris le patrimoine foncier cédé a la Libye mais apparemment pour
d’autres fins.
Le gouvernement
aurait en effet lancé des appels d’offre pour la construction de bureaux
administratifs pour une administration dont la prolifération des structures n’a
apparemment pas de limite. Il s’agit d’une décision vraiment décevante, œuvre
de bureaucrates plus intéressés à élargir leurs bureaux pour élever leur statut
qu’à servir des citoyens. Elle s’inscrit, de toute façon, en porte-à-faux par
rapport a votre ordre en 2008 de transformer impromptue la résidence du Premier
ministre, nouvellement rénovée et élargie, en clinique au profit des femmes et
des enfants. Je vous demande, pour le seul bien des jeunes Mauritaniens et la crédibilité
de l’Etat aux yeux des citoyens, d’ordonner l’arrêt immédiat de ce projet et la
réaffectation de ses ressources a la construction d’infrastructure scolaires
digne de ce nom sur le domaine initial du Lycée National.
Monsieur le
Président,
Vous ferez du
bien a votre pays en permettant la construction au cœur de la capitale d’un
grand établissement d’enseignement secondaire ou mille a deux milles élèves de
toutes les régions, ethnies et couches socio-économiques de la Mauritanie viendront
passer trois ans pour s’instruire mais aussi se connaitre and lier ces amitiés
d’enfance qui résistent aux frustrations de la vie. Notre pays a besoin de former
une élite du future bien éduquée et capable de se comprendre et de travailler
ensemble pour le bien commun. Il n’y a pas mieux que le cœur de notre capitale,
prés des quartiers administratifs et des centres de décision, pour incuber
cette élite du future qui constitue le seul rempart a la désintégration sociale
qui menace notre pays.
Monsieur le
Président,
Il faut finir et
le plus vite avec notre modèle d’éducation actuel qui érige une ségrégation de
fait entre riches et pauvres, mais aussi et peut être surtout entre les
différentes composantes de notre peuple avec les conséquences que chacun peut deviner
sur le futur de la cohésion du tissu social. Une ségrégation qui s’ajoute a une
autre, encore vivace, produite par la reforme de 1979 qui a placé la question
de l’identité ethnique et des langues nationales au cœur du débat sur
l’éducation, rendant ce dernier plus sentimental et idéologique que rationnelle
et méthodique et reléguant la question importante de l’offre d’une éducation de
qualité aux oubliettes. C’est ainsi que depuis 1979 pas un grand établissement
d’enseignement secondaire digne de ce nom n’a été construit dans notre pays. La
profession d’enseignant a été avilie et l’acquisition des savoirs a cessé
d’être un moteur de développent et de promotion sociale. Le système éducatif
s’est progressivement transformé en machine de production d’analphabètes ou
d’alphabètes incapables de s’insérer des les circuits modernes de production de
la valeur. Il a en outre produit une élite fragmentée, incapable de s’entendre
sur des normes et procédures communément admises pour la de gestion des
conflits et la sauvegarde des équilibres sociaux et économiques.
Monsieur le
Président,
Il est temps de
s’occuper sérieusement de notre jeunesse et lui offrir les outils cognitifs qui
lui permettent de dépasser la dichotomie entre tradition et modernité, langue
nationale versus langue étrangère et moi versus les autres pour donner une
chance aux Mauritaniens de se comprendre entre eux et avec les autres et de
contribuer positivement au bien être individuel et collectif. La paix sociale
et l’amitié entre les peuples en dépend. Cela est possible. Ce n’est
certainement pas une question de moyens.
En 1960, la Mauritanie était beaucoup plus
pauvre que maintenant. Le budget de l’Etat et des ménages étaient loin, très
loin, en nominal et en valeur des sommes faramineuses que les institutions
publiques et les plus nantis de nos concitoyens brassent aujourd’hui. Pourtant,
cela n’a pas empêché les autorités de l’époque de voir grand et d’investir en
priorité dans le futur. Le Lycée National fut doté de plus grand domaine
foncier de l’époque et parce que l’Etat ne disposait pas d’un corps
d’enseignant qualifiés, des professeurs et des proviseurs ont été importés de
l’étranger pour s’assurer que les jeunes Mauritaniens reçoivent une éducation
qui n’a rien a envier a celle offerte dans la sous-région. Le résultat a été
que les jeunes Mauritaniens ont excellé dans les universités régionales et
réussi à intégrer les grandes universités occidentale jusqu’aux années 90 avant
que la reforme de 1979 ne fasse ses effets dévastateurs sur l’école
Mauritanienne.
Monsieur le
Président,
Vous avez visité
le Lycée National durant l’une de vos descentes sur le terrain et, je suis sur,
constaté par vous-même l’état pitoyable des conditions d’études et
d’encadrement dans cet établissement, devenu méconnaissable pour ceux qui l’ont
fréquenté dans les années 80 et avant. Cela fait mal au cœur. Il est vrai que
le Lycée n’est plus fréquenté par les enfants nantis de la capitale, ni
même de la petite class moyenne pour qui
les prix exorbitants de ces établissements français et turcs sont inabordables.
Personne ne s’aventure plus à envoyer ses enfants dans l’école publique que
ceux qui n’ont pas d’alternative, les plus pauvres parmi les pauvres. Et
ceux-là peuvent être laissés à leur triste sort !
Monsieur le
Président,
On vous a déclaré
le Président des Pauvres et beaucoup veulent bien y croire tant est grande la
demande populaire pour des dirigeants qui prennent en compte, dans la
conception et la mise en œuvre des politiques publiques, les besoins réels des
populations. Sachez Monsieur le Président qu’aujourd’hui en Mauritanie, il
n’est pas bien d’être pauvre et surtout enfant de pauvre tant les perspectives
en matière d’éducation et de mobilité sociale sont presque inexistante. Et
après on s’étonne du développent de l’extrémisme et de l’intolérance et les
dérives violentes tant au niveau individuel que collectif observées ces dernier
temps dans un pays ou il n’y a pas très longtemps les habitants dormaient dans
la rue en toute tranquillité sans crainte d’être perturbés dans leur sommeil
par quoi que ce soit a part les muezzins et les coqs au levée du jour.
Qu’Allah protège
la Mauritanie.
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