Wednesday, December 22, 2010

DECLARATION

“Ô les croyants! Soyez stricts (dans vos devoirs) envers Allah et (soyez) des témoins équitables. Et que la haine pour un peuple ne vous incite pas à être injuste. Pratiquez l'équité: cela est plus proche de la piété. Et craignez Allah. Car Allah est certes Parfaitement Connaisseur de ce que vous faites.” Al-Maidah, verset 8.

Biram Ould Abeid, activiste de renom, friand de diatribes virulentes contre les institutions de l’Etat et les symboles traditionnels de la société, est arrêté et placé sous mandat de dépôt suite a une altercation avec des éléments de la police nationale au sujet d’une affaire ou deux jeunes filles mineures seraient victimes d’esclavage, d’après les allégations de son organisation IRA-Mauritanie.
Mauritania Projet conseillent aux autorités judiciaires de traiter cette affaire avec la diligence requise et d’offrir aux inculpés les garanties juridiques en vigueur dans les grands pays de droit. La Justice doit dire le dernier mot et la loi appliquée dans toute rigueur. On ne le répétera jamais assez : l’impunité est la pire des formes d’injustice. Sa prévalence dans le pays est une source de grande inquiétude pour l’ordre et la stabilité non seulement des institutions de l’Etat mais aussi de la société dans son ensemble. L’impunité est un appel à la récidive et une invitation pour les victimes de se faire justice eux-mêmes.
Mauritania Project rappelle que les pratiques esclavagistes ont été identifiées et criminalisées par une loi de 2007, qui de l’avis des militants des droits de l’homme est juste et corrige les lacunes qui existait auparavant dans le dispositif juridique d’éradication de l’esclavage dans notre pays. Le terrain de lutte dans ce domaine n’est plus la politique, ni a fortiori la rue, mais la loi, la réalité de son application et sa vulgarisation à l’échelle populaire pour que les citoyens prennent conscience des changements introduits. Le reste procède d’une tactique dangereuse déjà expérimentée dans notre pays ou l’aspiration légitime pour l’émancipation et la justice est détournée à des fins sectaristes par des activistes sans scrupules peu conscients de la gravité de leurs actes. Une situation qui peut dégénérer a tout moment avec les conséquences qu’on connait sur la paix civile et le respect des droits de l’homme. Les drames de 1989-1991 dont les plaies ne se sont pas encore cicatrisées doivent rappeler à tous le danger des luttes sectaires et l’exigence pour les activistes d’inscrire leur combat dans le cadre institutionnel.
Mauritania Project appelle les partis politiques et les organisations de la Société Civile à œuvrer pour la consolidation de l’Etat républicain et à rejeter toutes les formes de sectarismes qu’elles soient de sens tribal, ethnique ou social. Les Mauritaniens doivent apprendre et s’éduquer à vivre ensemble avec leurs différences qui même si elles représentent des défis n’en sont pas moins porteuses de richesses.

Mauritania Project
Washington DC

Tuesday, December 14, 2010

La lutte contre la Gabegie

Pour commémorer la journée internationale contre la corruption, l’UPR, le plus grand Parti politique de la majorité présidentielle a organisé un débat sur la gabegie et conclu une entente avec les hommes de Adil vilipendés comme les symboles de cette même gabegie. La grande salle du Palais des Congres était archicomble, il y avait la un nombre impressionnant de hauts fonctionnaires et de courtisans, d’hommes d’affaires et de courtiers, et d’activistes et militants. On pouvait voir dans les premiers rangs, le Président de la Haute Cour de Justice, l’Inspecteur General de l’Etat et bien d’autres dont les fonctions devraient normalement les restreindre à un minimum de réserve. Les mentalités n’ont donc pas évolué, le show politique est toujours considéré comme le meilleur moyen de se faire valoir ; la séparation formelle entre les fonctions politiques de leadership et celles techniques managériales de direction et de contrôle n’est apparemment pas encore a l’ordre du jour. Malgré le discours, les slogans et la psychose, la réalité reste sur le fond inchangé. Les ressources de l’Etat et de la Nation sont toujours aux mains de ceux qui sont les plus mal placés pour assurer leur meilleure gestion. La médiocrité continue de ronger le fonctionnement de l’Etat. Aucun changement systémique n’a été introduit dans la manière de gérer les affaires publiques qui nous emmène à croire que l’ère des détournements et du gâchis est irrémédiablement révolue.

Diaw est un diplomate de carrière à la veille de la retraite. Il y a 35 ans, il est devenu fonctionnaire au Ministère des Affaires Etrangères à l’issue d’une formation à l’Ecole Nationale d’Administration (ENA)- un cursus de deux ans destiné à préparer des cadres de haut niveau pour les fonctions diplomatiques et consulaires. L’ENA était une école d’élite selon les standards de l’époque et avait vocation à le demeurer avant qu’elle ne soit rongée par le même virus qui a eu raison de toutes les institutions de l’Etat mises en place au lendemain de l’Indépendance. Diaw a vu plusieurs de ses promotionnaires accéder aux fonctions prestigieuses d’ambassadeur et de consul. Pour lui, cela n’a jamais été possible pour des raisons qui ne lui ont jamais été clairement explicitées. Son expérience et ses qualifications ne lui ont valu que d’être balancé d’une ambassade à une autre selon les caprices des gestionnaires du personnel au Ministère. M. Diaw ne fait pas de politique et ne dispose pas de connections au sein de l’appareil d’Etat.

Mohamed n’a jamais fait de concours pour acceder à la Fonction Publique et n’a jamais suivi une formation en diplomatie. Son cursus universitaire se limite à une maitrise de la Faculté de Nouakchott et une année passée au fameux institut de la ligue en Arabe au Caire dont le diplôme n’est reconnu par aucun pays a l’exception de la Mauritanie. Il se fait recruter au corps très convoité des professeurs de l’enseignement supérieur dont l’accès est au passage interdit a des docteurs d’universités prestigieuses et d’enseignants expérimentés pour des raisons dit on de limite d’âge. Il n’enseignera pas mais utilisera son nouveau statut de fonctionnaire pour se faire nommé premier conseiller diplomatique au Caire ou il restera une quinzaine d’année avant d’être copté comme ministre dans le Gouvernement éphémère de Yahya O El Waghef. Le Président de la République le nommera ambassadeur dans l’un des pays du Golf. Mohamed est le cousin de Bennahi O Ahmed Taleb, l’ancien directeur du Cabinet du Président Ould Taya, et le mari de la sœur de la femme du Général Gazwani.

Ces deux exemples loin d’être uniques illustrent les contradictions du Pouvoir actuel qui tout en fondant sa légitimité sur la lutte contre la gabegie s’engouffre de plus en plus dans la gestion de la routine et ignore volontairement ou par incompétence les actions qu’il faut pour rendre une telle légitimité réelle et clairement irréfutable. L’entente avec Adil n’augure rien de bon et ajoute au discrédit d’un Pouvoir qui a été incapable de se distinguer de ses prédécesseurs dont il a adopté les méthodes avant de copter les hommes.

La gabegie dont la lutte contre est devenu un slogan pour le pouvoir issu du Coup d’Etat du 6 Aout 2008 et a justifiée la déposition du premier Président élu de la Mauritanie est un mal endémique dont le traitement nécessite plus que des mesures superficielles, limitées dans le contenu et la durée et détachées d’une stratégie cohérente et réfléchie visant a changer profondément la manière dont sont gérées les affaires de l’Etat dans notre pays. Elle trouve sa source dans l’injustice et l’irrationalité des processus de sélection pour les emplois publics et l’absence totale de procédures effectives d’évaluation et de contrôle des performances, a commencer par le plus prestigieux et le plus enviée des emplois publics le poste de Président de la République. Depuis que le père de la Nation et les chefs militaires qui lui ont succédé a la tête de l’Etat ont transformé les élections en formalité pour les confirmer dans ce qu’il considère comme leur droit naturel et vidé de toute substance les procédures qui limitent et balancent leur pouvoir, le signal a été donné implicitement a tous ceux qui détiennent une parcelle minime soient elle de l’autorité publique d’agir de la même façon. Le service public tel qu’hérité de l’administration coloniale s’est vite Mauritanisé, non pas dans le sens d’une symbiose entre la modernité et les valeurs de l’Islam tel que l’ont voulu les pères fondateurs de la Mauritanie mais sur un mode tribal très proche de ce qui prévalait avec la colonisation avec un réseau informel d’allégeance et de distributions des avantages très loin de la conception Jacobine ou Wébérienne de l’Etat. Cinquante ans après l’indépendance, pas une institution publique ne se distingue du reste par des règles impersonnelles bien conçues et justement appliquées de gestion de ses ressources qui peut constituer un modèle ou une source d’inspiration à imiter.

Cette échec lamentable des processus de gouvernance qui a débouché sur les formes de gabegie qu’on connait trouve sa source en grande partie dans l’incapacité de l’élite éduquée a s’accorder durablement sur un minimum de principes et de valeurs gouvernant les manières dont sont gérées les affaires de l’Etat. Les domaines et compétences de ce dernier sont, rappelons le, des notions complètement étrangères a la société traditionnelle et méconnues, voire rejetées par ses leaders. Si l’élite éduquée, éclairée par les connaissances et les savoirs accumulées sur une longue durée, est incapable de s’accorder sur des aspirations communes et des procédures pacifiques de règlements des conflits, que dire du reste d’une société marquée par des siècles de vendettas tribales, de violences comme méthode privilégiée de résolution des conflits, d’esclavage et d’animosité sociale.

Cinquante ans après l’Indépendance, l’enchevêtrement des compétences, la dilution des responsabilités et l’ineffectivité des contrôles restent les traits marquants de la gouvernance en Mauritanie. Pire, aucune des formations et leaders politiques qui comptent n’a articulé une vision claire de ce qui doit être fait pour changer cet état des choses. Le dialogue politique ne s’est jamais centré sur ces questions fondamentales, ni aboutit a des propositions partagées de reforme des institutions constitutionnelles dans un sens qui assurent une redistribution plus balancée des pouvoirs et une agrégation des structures pour limiter leur nombre et minimaliser leur cout.

Le Président de la République dont le pouvoir réel n’a pas de limite doit comprendre qu’il est de son intérêt et de celui supérieur de la Nation de volontairement circonscrire son pouvoir à la supervision du travail de son Gouvernement et de son administration. Il n’y a aucun risque que ses prérogatives soient menacées par un Parlement et un appareil judiciaire dont le degré d’autonomie reste très dépendant du bon vouloir de l’Exécutif. Le Chef de l’Etat doit trouver les gestes et les mécanismes pour signifier au juges et au parlementaires qu’ils n’ont de comptes a rendre qu’a leur conscience et au peuple qui les a élus. Il doit se débarrasser de la Primature qui n’a pas de place dans un système qui même si il revêt un faux habit de semi-parlementaire est en réalité un régime présidentiel avec le contrôle parlementaire en moins.

Pour permettre aux juges de dire le droit en toute indépendance, leur nomination doit faire l’objet d’un débat parlementaire pour jeter la lumière sur leur compétence et leur intégrité. Avant d’être confirmé dans son poste et bénéficier de l’inamovibilité que lui confère la loi, un juge nouvellement nommé par le Gouvernement peut passer devant le Parlement pour convaincre les élus du peuple de sa capacité à assumer sa fonction et obtenir ainsi une confirmation de son rôle et de son indépendance vis-à-vis de l’Exécutif.

Le Parlement qui n’a jamais produit une loi ni censuré le plus petit des fonctionnaires doit être limité a une seule chambre. C’est l’avis de la majorité de ceux qui s’intéressent aux affaires publiques en Mauritanie. Le Senat coute cher et sa valeur ajoutée est inexistante. Les modes de désignation des sénateurs sont injustes et favorisent la corruption des élus locaux. Sa suppression permettra de dégager des moyens qui peuvent servir à améliorer le travail de l’Assemblée Nationale. Les députes même si leur traitements sont convenables manquent de moyens logistiques et d’expertise sans lesquelles leur travail reste dépourvu de consistance. Les députes et les commissions parlementaires doivent disposer d’assistants qualifiés et de documentation pour rendre effectif leur pouvoir d’analyse, d’investigation et d’évaluation.

Le dialogue politique réclamé par l’opposition et voulu par le pouvoir n’a de sens que s’il s’intéresse à ces questions fondamentales et cherche à arriver à un compromis réel sur un système de séparation et d’articulation des pouvoirs constitutionnels que les acteurs politiques s’engagent à respecter.

L’efficacité de l’action publique est aussi intrinsèquement liée à la mise en place d’une bureaucratie d’Etat dont l’autorité découle d’une expertise reconnue dans la résolution des problèmes qui se posent à la société. Que ce soient les mandarins chinois, les Enarques français ou ces animateurs de think tanks américains qui se recrutent essentiellement parmi les anciens élèves des grandes Université de la cote Est, il s’agit toujours de placer aux commandes des systèmes de pilotages de la société les plus intelligents et les plus capables. Les chercheurs et professionnels de la gestion des ressources humaines ont conçu des instruments perfectionnés qui permettent d’assurer une adéquation optimale entre les hommes et les taches qui leur sont assignées dans une optique d’un maximum d’efficacité économique et sociale. Ignorer ces aspects a déjà couté très cher à notre pays et risque de lui couter encore plus si rien ne change dans la manière dont sont gérées les affaires de l’Etat.

Le Président de la République a visité le Lycée d’excellence nouvellement créé a Arafat et appelé les élèves a redoubler d’effort et a s’orienter vers les disciplines scientifiques ou la rigueur est de mise. Son Gouvernement promet de multiplier ce genre d’établissements et créer un nouvel campus universitaire avec une plus grande diversification des filières de l’enseignement supérieur. Le but louable est de combler le retard considérable dans la formation des cadres de haut niveau et de bonne qualité. Une orientation opportune qui s’accommode néanmoins très mal avec la persistance d’une gestion des personnels de l’Etat de manière approximative presque entièrement dominée par le népotisme et le clientélisme politique et social. Pire, l’Etat, le plus grand employeur, vers lequel se tourne la majorité des diplômés de l’Enseignement Supérieur n’offre pas de perspective de carrières intéressantes et ses capacités de recrutements sont limitées par la masse déjà présente d’agents non qualifiés, pour la plupart bons a rien, dont il ne peut se séparer pour des raisons dit on politiques.

Ni le Ministère chargé de la Fonction Publique, ni celui de l’Enseignement Supérieur ne disposent de stratégies appropriées pour sortir le Gouvernement de ce pétrin. Ils n’ont ni les compétences, ni les ressources pour mettre en place les mécanismes appropriés pour s’assurer qu’une compétition par le haut prend forme et s’installe dans la durée.

Cinquante ans après l’indépendance et vingt ans après les premières tentatives de reforme de la fonction publique (Projet de développement Institutionnel et de la Reforme mis en place à la fin des années 80 dans le cadre des plans d’ajustement structurel), l’Etat continue à ignorer le nombre exact de ses agents – malgré les recensements successifs de 1990, 2007 (Education Nationale), 2008, 2010 qui ont couté des fortunes. Pire, des milliers de fonctionnaires dont certains occupent les échelons supérieurs de l’administration ont été recrutés suivant des procédures illégales sous la pression de la demande clientéliste, le moteur principal de la croissance des effectifs de la Fonction Publique. Les agents de l’Etat n’ont jamais fait l’objet d’une évaluation sérieuse comme si leur qualité et leur cout n’ont pas d’importance.

Dans tous les pays, il y a des standards pour évaluer les compétences, les niveaux de formation et de qualifications, et les aptitudes. En Mauritanie, le seul standard disponible est l’Université de Nouakchott, l’une des moins performantes sur le continent africain, une honte pour un pays qui a été à un moment une destination pour l’acquisition des savoirs.

Apres trente ans d’existence, la seule Université du pays continue de faillir à sa mission de créer un foyer national d’excellence pour l’acquisition des connaissances et la maitrise des savoir-faire nécessaires pour les techniciens et managers de haut niveau. Les étudiants y vont faute de mieux. Ses professeurs la quittent des que l’opportunité se présente. Ses diplômes peuvent être falsifiés. Ses diplômées grossissent le plus souvent les rangs des chômeurs sans qualifications. Malgré ses carences bien établies depuis sa création, rien de sérieux n’a jamais été fait pour changer cette situation. Pire, elle est devenue par la force des choses, le standard par défaut sur lequel se mesurent les diplômes obtenus par les Mauritaniens étudiants à l’étranger. Aussi, tous ceux qui vont passer quelque temps ailleurs peuvent revenir au pays bardés de diplômes, s’ils disposent de connivences au sein de la commission d’équivalence, une structure laissée à l’abandon malgré son importance et son utilité. Il n’est des lors pas étonnant que le plus court chemin vers la réussite professionnelle est d’aller au Caire passer une année sabbatique dans un centre de formation connu sous le nom pompeux de l’Institut du Monde Arabe, non reconnu par aucun pays, incluant l’Egypte, le pays qui l’héberge, et revient après un an bardé d’un diplôme de troisième cycle, le ticket favori pour l’entrée dans le corps très prisé des professeurs de l’Enseignement supérieur.

Notre pays regorge de ressources comme l’aime a le répéter ses responsables mais son élite sème depuis sa création les germes de sa déconfiture. Les clés de salut sont toujours et comme cela a été toujours le cas, dans les mains du Président de la République. Il est le seul responsable a board. Son ambition l’a poussé a occuper une place que personne ne doit lui envier considérant les responsabilités qu’elle implique et pour lesquelles il répondra au moins devant Allah et certainement devant l’Histoire, si histoires il y a.

Le Président de la République n’a le choix qu’entre s’élever au niveau des responsabilités historiques qui sont les siennes pour créer les conditions d’une renaissance de la Nation Mauritanienne ou devenir l’esclave de son ambition et donc la marionnette d’une classe d’arrivistes sans foi ni loi qui ne voient en lui que le passage obligé vers la satisfaction de leur besoin de s’entretenir en permanence sur le compte de la collectivité. De ce choix dépend la qualité du contenu donné à la lutte contre la gabegie et le degré de légitimité du pouvoir de Mohamed Ould Abdel Aziz.

Wednesday, November 10, 2010

La lutte contre le terrorisme

Quand en Juin 2005, deux ans après le coup armée visant la destitution de Moawiya O Sid’ Ahmed Taya par un groupe d’officiers dirigé par l’ex commandant Saleh O Hannena, une garnison de l’armée Mauritanienne dans l’extrême nord-est est attaquée par un groupe se réclamant de la "mouvance jihadiste", la surprise est totale. Pour la première fois depuis la fin des hostilités avec le Front Polisario, la Mauritanie est victime d’une agression préméditée de la part d’un ennemi qu’elle n’a pas choisi. Le bilan est lourd, plusieurs dizaines de morts et de blessés. L’intégrité du territoire est sérieusement menacée. Ceux conscients de la fragilité d’un pays pauvre, trop longtemps mal gouverné, s’inquiètent et appellent à l’unité nationale face aux dangers qui se multiplient. Les condamnations fusent de toutes parts mais elles ne révèlent aucun consensus sur la meilleure manière de réagir à une agression que beaucoup préfèrent mettre sur le compte des agissements irréfléchis d’un régime en phase terminale. Ni les manifestations gigantesques organisées par les soutiens du pouvoir, ni les unités armées lancées à la poursuite des assaillants ne permettent au pays de reprendre l’initiative. Lemghayti mettra a nu les faiblesses d’un régime qui n’a que trop duré mais n’engendra aucune prise de conscience significative d’un défi sécuritaire qui s’avéra plus durable que n’ont espéré ceux qui n’ont vu dans cette attaque qu’un phénomène passager.

La déposition de Moawiya en Aout 2005 fait oublier pour un temps le danger de la "mouvance jihadiste". Le pays respire un air d’optimisme à la suite de l’engagement des autorités militaires de transition de préparer les conditions d’un retour a un régime constitutionnel marqué par une extension du champ des libertés et la possibilité d’alternance même au sommet de l’Etat. La parole est donnée à ceux qui en étaient exclus, les prisons se vident et le processus démocratique se consolide par la mise en place d’institutions constitutionnelles suivant des règles de transparence globalement satisfaisantes.

Il fallait attendre plus de deux ans et demi après l’attaque de Lemghayti pour que les "jihadistes" frappent de nouveau avec, cette fois, l’assassinat pour la première fois sur le sol national de touristes français suivi par la tuerie de trois soldats à Al Ghalawiya. Le pays est sous le choc. Son image de paisible terre d’hospitalité prend un sacrée coup. Il s’en remettra difficilement. Les services de sécurité, pris de cour, font face, pendant plusieurs semaines, à une mini guérilla urbaine avec des jeunes armés très mobiles disposant de complicités au sein de la police – ils se permettent le luxe de faire évader l’un des leurs le jour de la visite d’un chef d’Etat, non des moindres, dans notre pays. Les défaillances de l’appareil sécuritaire apparaissent au grand jour. Le pouvoir et la classe politique, trop occupés par les manœuvres politiciennes d’un processus de recomposition politique qui n’aboutira jamais, préfèrent ignorer le danger et refusent de sonner l’alarme. Une attitude lourde de conséquence qui fera apparaitre les institutions démocratiques comme inadéquates face à une confrontation de plus en plus évidente avec des groupes extrémistes décidés d’en découdre avec notre pays.

Il a fallu l’arrivée d’un militaire à la tête de l’Etat pour que les forces armées nationales passent à l’attaque et que s’affiche une volonté claire de sécuriser le territoire en confrontant par la force si nécessaire des groupes extrémistes qui commencent à semer la terreur dans la zone saharienne en général et dans notre pays en particulier. Certains pour des raisons politiques y ont vu la main d’une puissance étrangère et/ou la dérive dangereuse du tout sécuritaire qu’un pays comme le notre ne peut se permettre faute de moyens. C’est l’exercice légitime du droit de dissidence établie dans toutes les démocraties. Son respect doit être de rigueur. Cela dit, dans ces même démocraties les voix dissonantes se raréfient quant le pays est victime d’une agression étrangère et qu’il poursuit son droit reconnu d’auto-défense. Il est, en effet, difficile d’imaginer un pays continuer à ignorer les atteintes successives à sa souveraineté sans réagir et sans poursuivre une stratégie d’autodéfense mettant en œuvre tous les outils tactiques à sa disposition, incluant l’assistance étrangère et l’utilisation de la force si nécessaire.

Qu’on le veuille ou non, la Mauritanie est en guerre avec un ennemi armé qu’elle n’a pas choisi, qui se nourrit de ses faiblesses et pose un réel danger pour son existence. C’est un front nouveau, beaucoup plus sérieux, qui s’ajoute à d’autres plus insidieux comme la pauvreté et l’ignorance, la gabegie et le gâchis, les injustices et l’exclusion. Il est peu probable que notre pays sortira victorieux de cette nouvelle guerre – il en a tellement perdu qu’on se demande comment! – non pas qu’elle n’est pas juste, ni que les forces armées se trompent dans l’utilisation des instruments stratégiques et tactiques à leur disposition, mais plutôt pour les faiblesses structurelles des institutions concernées par cette guerre, resultat d'un processus long de gâchis des ressources physiques et de dégradation de l’étique et de la valeur humaine.

Les forces armées nationales
Créée aux lendemains de l’indépendance par une poignée d’officiers choisis par le premier Chef de l’Etat parmi la petite minorité d’instruits et formés en accéléré dans les académies militaires française, l’Armée Nationale bénéficiera de l’effort de guerre durant le conflit du Sahara occidental pour multiplier ses effectifs, disposer d’équipements lourds et renfoncer ses outils de formation et d’entrainement. Elle sortira de cette guerre vaincue mais considérablement renforcée tant en terme de moyens humains et matériels que de capacité logistiques et opérationnelles. Mais cette tendance à la hausse tant en quantité qu’en qualité sera paradoxalement renversée par la prise du pouvoir par les chefs militaires. Les différentes purges consécutives aux multiples tentatives de coup d’Etat ont vidé l’Armée d’une partie importante de son commandement. Cela au moment ou aucun processus efficace de renouvellement de l’encadrement militaire n’a été mis en place. Les motivations des nouvelles recrues sont plus mercantiles, l’armée est devenue le moyen le plus sur d’accéder au pouvoir et donc à la richesse. On y place ses fils et « cousins » au mépris des règles élémentaires de la méritocratie, le népotisme y atteint les sommets. Les valeurs militaires traditionnelles d’honneur, de bravoure, de sacrifice, et de leadership deviennent secondaires et disparaissent petit à petit. La troupe suit à son tour. Les petits salaires conjugués à la démotivation ne permettent plus de recruter que des soldats bons à rien. Seule la garde présidentielle pour des raisons liées à la sécurité personnelle du Chef de l’Etat jouit d’un certain professionnalisme.

Ce genre d’armée ne peut affronter dans la durée un ennemi dont la force réside dans la motivation et l’endurance de ses éléments. Même « égarés » du chemin traditionnellement tracé par les savants et érudits musulmans, les "jihadistes" comme leurs ancêtres Al Kawarij sont connus pour leur détermination et bravoures en combat. Ils ne seront vaincus que par une armée de professionnels motivés et rompus aux méthodes de combat. En somme, une armée qui reste à construire.

Nos savants et érudits
Il n’est pas sur que notre pays a gagné la bataille du narrative. Le nouveau front n’est pas seulement militaire, c’est aussi une compétition pour le contrôle des esprits de cette jeunesse musulmane que la conjugaison de multiples facteurs a rendu réceptives aux idées nihilistes de toute sortes et prône à l’utilisation de la violence même contre les siens suivant une logique apocalyptique et suicidaire.

Le rôle des savants et érudits dans cette bataille des idées est maintenant bien établie. Il ne s’agit pas moins que de rendre plus visible la place de l’Islam dans des sociétés traditionnelles tourmentées entre la vision d’un passé mythologiquement glorieux, un présent qui l’est moins et un futur très incertain. Cela au moment ou l’institution religieuse officielle est largement discréditée aux yeux d’une bonne partie de la jeunesse soit par son manque d’autonomie et/ou l’incompétence de ses éléments dans le domaine social et politique. Nos Ulémas ne se distinguent pas du reste de la société. Ils sont nombreux et mal organisés, amateurs et peu formés, et prêchent le plus souvent par la parole et non par l’action. Leur inclinaison à ménager les plus forts n’est pas de nature à rehausser leur statut aux yeux des révoltés et victimes des injustices.

Il faut plus que cela pour convaincre des jeunes suspicieux à l’égard des autorités présentes et soumis aux effets des medias internationaux qui les submergent d’information contradictoires et d’alternatives multiples et diversifiées.

L’élite politique et laïque
Ceux qui ont la responsabilité des affaires de la nation ont pour la plupart été formés à l’école de l’arrivisme mercantile sans aucun regard pour les processus comme si la réussite et le bonheur se trouvaient quelque part à des arrêts fixes qu’il faut rejoindre au plus vite. C’est la course effrénée pour les postes aux échelons élevés de l’encadrement politique, administratif et social avec les ravages qu’on connait tant aux niveaux individuels que collectifs. Tous ces anciens Présidents, Ministres, directeurs, conseillers, chefs de Partis, et hommes d’affaires, à l’origine élèves et citoyens modèles, devenus bons à rien sauf a vouloir coute que coute sauvegarder autant que possible des privilèges indus obtenus à un moment ou un autre de cette continuelle Hawassa instituée en système de répartition de richesses rares dont la gestion parcimonieuse devait être au sommet des priorités.

Cette Hawassa tout en étant un gâchis de ressources est aussi un stimulateur de la violence et se trouve pour beaucoup à l’origine de la dérive terroriste des « égarées » qui même s’il n’ont pas été eux même victimes peuvent facilement s’identifier à cette masse de jeunes en colère contre une société qui ne leur offre que peu tout permettant à une minorité d’acquérir, d’étaler et de gaspiller des richesses illégitimes en contradiction flagrante avec les valeurs et principes de l’Islam, « la religion de l’Etat et du peuple ».

La Hawassa continue parce que les règles d’une réelle méritocratie sont loin d’être mises en place. Le discours officiel parait certes plus conscient de l’insupportable condition de la fonction publique mais dans la réalité de tous les jours, les choses n’ont pas beaucoup changé. Chasser le naturel il revient au galop.

Le Président de la République a le mérite de l’audacité. Espérerons que c’est de l’audacité de l’espoir qu’il s’agit comme celle du Président américain dans son livre « Audacity of Hope » ou le volontarisme de l’idée l’emporte sur le cynisme de la réalité qui a permis a ce fils d’une mineure du Kansas et d’un étudiant africain de devenir le Président du plus puissant pays du monde et d’introduire dans son pays des changements fondamentaux pour le bénéfice des pauvres er des exclus. C’est la meilleure voie pour lutter contre la violence aveugle qui se nourrit de la détresse humaine.

Monday, May 17, 2010

La dérive de l'opposition

Dans leurs meetings et communiqués, les partis politiques regroupés au sein de la Coalition des l’Opposition Démocratique ne cachent plus leur volonté de renverser le pouvoir en place par tous les moyens légaux et illégaux disponibles. Il s’agit en fait d’une tentative délibérée de confrontation visant à troubler l’ordre public et encourager la rébellion au sein des forces armées nationales. Pour la première fois depuis le déclenchement du processus démocratique au début des années 90, des dirigeants de formations politiques et non des moindres appellent ouvertement au coup d’Etat, une brèche à la déontologie politique qu’aucun d’eux n’a osé durant le long et douloureux règne de la gabegie auquel ont participé certains des plus vocaux leaders de l’opposition actuelle.

Mauritania Project dénonce cette stratégie subversive contraire aux principes et idéaux démocratiques qui doivent encadrer l’action de toute opposition responsable soucieuse de l’intérêt de la Nation et consciente de la nécessite de préserver les acquis à la tête desquels se trouve la stabilité des institutions et le respect de la règle de droit.

Mauritania Project rappelle que l’élection du Président de la République, le 18 Juillet 2009, - à l’issu d’un processus négocié et mis en œuvre par la classe politique dans son ensemble, surveillé et soutenue par la société civile et la communauté internationale - a rétabli l’ordre constitutionnel et mis fin a la crise générée par la rupture de ce dernier. Il n’est des lors plus tolérable que ceux qui ne se retrouvent pas dans cette nouvelle donne continue à agir comme si le pays reste dans un état d’exception ou la règle de droit n’est pas la référence.

Mauritania Project réitère son soutien au Président de la République et appelle son Gouvernement à éviter l’engrenage de la confrontation et à redoubler d’effort pour aider à résoudre les problèmes aigus de mal gouvernance, de gâchis de la ressource, et de délabrement des services publics légués par des décennies d’injustices er de laisser aller.

Thursday, April 15, 2010

Le MESS dans le collimateur des extrémistes de l'arabité

Le Ministre de l’enseignement secondaire et supérieur, M. Ahmed Ould Bahiya, a lors d’un meeting avec les étudiants de l’Université de Nouakchott, voulu calmer les esprits et dissiper des malentendus causés par les déclarations de certains membres du Gouvernement dont le Premier ministre. L’Université est depuis quelque temps le domaine de frictions entre étudiants au sujet de l’arabe dont nul ne conteste le caractère central dans notre pays. Selon plusieurs sources, le Ministre n’a pas contredit les propos du Premier ministre, il a simplement affirmé que le Gouvernement n’envisage aucun changement dans le dispositif éducatif actuel avant la tenue des états généraux de l’éducation que son Ministère compte organiser prochainement. Il a clarifié un autre point soulevé par un étudiant relatif à une déclaration de la Ministre de la culture concernant les langues nationales. La Ministre avait au sujet de l’arabe cité les conclusions d’un rapport de l’ALESCO mettant en garde contre les dangers à long terme sur la préservation de l’arabe classique que constitue l’usage extensif dans les medias des dialectes arabes locaux comme l’égyptien, le maghrébin et le syrien. Le Ministre a tenu à clarifier ce point pour signifier aux étudiants que cela n’a rien à voir avec le développement de nos langues nationales qui reste un objectif du Gouvernement.

Les propos du Ministre de l’enseignement secondaire et Supérieur ont été dénaturés et placés hors contexte pour souffler la zizanie au sein du Gouvernement. Des étudiants ont été manipulés pour troubler l’ordre éducatif dans l’enceinte de l’université. Des chefs de partis qui viennent justes de prêter allégeance à un chef d’Etat étranger ont demandé sa démission. Le but de toute cette entreprise est de semer les troubles pour presser le Gouvernement et l’amener à se soumettre aux dictas de ceux qui refusent que l’école mauritanienne réponde aux besoins de l’économie et aux contraintes de la mondialisation et de l’ouverture.

Le Ministre de l’enseignement secondaire et supérieur est victime d’une campagne d’intoxication dont le but non avoué est de déstabiliser le Gouvernement et de saboter les efforts entrepris par celui-ci pour relancer le secteur de l’éducation qui a trop longtemps souffert de la médiocrité, du laisser aller et de la politisation. Des groupes spécialisés dans la propagande et la manipulation qui instrumentalisent la défense de l’arabité à des fins particularistes contraires aux intérêts des individus et de la collectivité nationale ont juré d’avoir sa tête comme ils l’ont souvent fait contre ceux qui veulent servir ce pays avec professionnalisme et intégrité. A l’apogée de leur influence sur les sphères supérieures de la décision nationale, ont été commises les plus grandes bêtises dans la conduite des affaires de l’Etat, en particulier celles relatives à la valorisation des ressources humaines et le renforcement de l’unité nationale.

Le Président de la République a choisi de mettre à la tête du Ministère de l’Enseignement Secondaire et Supérieur un professionnel du secteur dont les qualifications sont bien établies et la probité reconnue. Pour la première fois depuis longtemps les enseignants et les étudiants ont un interlocuteur qui comprend leurs problèmes et leurs soucis pour les avoir vécu lui-même pour un bon bout de temps. Le Président de la République a rompu avec cette tradition malheureuse qui voulait qu’à la tête du département de l’éducation nationale ne soit nommé qu’un néophyte sans grandes qualifications, qui n’a jamais enseigné et qui n’est là que pour gérer la routine. Une tradition qui a laissé un département stratégique à la merci des groupes de pression idéologiques pour qui l’école ne peut être autre chose qu’un instrument de propagande et d’endoctrinement pour isoler la jeunesse du monde et maintenir le pays dans l’ignorance et le sous-développement.

Mr. Ahmed Ould Bahiya, pour ceux qui ne le connaissent pas, est titulaire d’un doctorat d’Etat en mathématiques, a enseigné pendant plus de vingt ans à la Faculté des Sciences de l’Université de Nouakchott et donné des cours dans des institutions supérieures au Canada. Il est chargé de mettre en œuvre une politique ambitieuse dont les contours ont été bien définis par le Président de la République. Le but n’est autre que de réaliser le projet longtemps différé d’un campus universitaire construit selon les règles de l’art et qui fonctionne suivant les normes et standards établies dans le domaine. Des arrangements ont été faits en application des instructions du Président de la République pour raccourcir les délais et éviter les gâchis.

Il est temps de prendre la juste mesure des changements profonds qualitatifs envisagés dans le secteur de l’éducation et accepter de les accompagner plutôt que chercher à les bloquer par la propagation des fausses rumeurs et les campagnes démagogiques. Le pays s’en portera mieux.

Thursday, February 4, 2010

Ne touche pas à mon drapeau

Il y a cinquante ans la Mauritanie devenait indépendante. La France, fatiguée par les guerres d’Indochine et d’Algérie et lassée d’une entreprise coloniale qui n’offrait plus les avantages ni les promesses du siècle précédent entamait depuis quelques années un processus de décolonisation qui pour notre pays aboutit le 28 Novembre 1960 par cette déclaration, sous la tente, de notre Independence nationale. Moktar Ould Daddah devenait the chef d’un projet d’Etat et de République et créait avec le petit noyau de la future élite le premier symbole de la nouvelle souveraineté. Le drapeau et l’hymne nationaux voient le jour, ils n’ont jamais depuis lors été mis sérieusement en cause. Ils restent les rares symboles auxquels les mauritaniens sont sentimentalement attachés. Leur changement n’apporte rien de positif et son cout financier n’est pas négligeable pour un Etat en difficulté de payement.
Les journées de réflexion organisées récemment par la majorité présidentielle sont une bonne initiative. Les partis d’opposition auraient été mieux inspirés de participer a ce dialogue informel pour évaluer les acquis et les défis après un demi siècle d’indépendance et les perspectives d’avenir. Le débat a cependant comme il est de coutume éviter les questions de fonds pour finalement conclure sur des propositions qui n’attirent l’attention que par cette demande insolite de changer le drapeau et l’hymne de ce pays comme si ces derniers symbolisaient, dans la conscience collective, la gabegie, l’injustice, la dictature ou l’oppression.
Au contraire, la Mauritanie a besoin de conserver les symboles de sa souveraineté, maintenir vivace la mémoire de ses premières années d’indépendance comme source d’inspiration pour les générations présentes et futures et retrouver l’élan, l’esprit et la volonté de ses pères fondateurs qui ont donnée de leur mieux pour construire cette communauté de destin.
En 1960, le pays n’était pas préparé à l’indépendance. Ces populations n’ont d’ailleurs pas cherché cette auto-détermination que la puissance coloniale leur a octroyée. Beaucoup de notables voyaient avec inquiétude le passage à une autorité autochtone qui serait à leurs yeux inapte au commandement et incapable de dépasser les contradictions sociologiques précoloniales. La rareté des cadres, l’absence d’infrastructure scolaire, et le peu de ressources naturelles conjuguées aux challenges de la reconnaissance internationale étaient de nature à décourager les plus zélés des indépendantistes. Le noyau de la future élite regardait au nord ou au sud, chacun selon son appartenance ethnique pour une alternative a un Etat national qui reste aux yeux de la majorité peu viable, l’administration coloniale n’ayant eu ni le temps ni les ressources de créer une infrastructure durable pour une autorité centrale incontestable. Les défis était énormes et rares étaient ceux qui pouvaient parier qu’un demi siècle plus tard, la Mauritanie serait ce qu’elle est aujourd’hui.
L’indépendance a réussi. Le pays a consolidé son unité nationale, mis en place les bases d’un Etat moderne et s’est enrichi et démocratisé. N’eut été le PPM (Parti du Peuple Mauritanien) et la guerre du Sahara, la Mauritanie aurait certainement mieux réussi son évolution vers l’économie de marché et l’Etat de Droit. Mais dans l’ensemble, les mauritaniens sont relativement et dans l’absolu mieux éduqués, plus riches que leurs parents et leurs aspirations collectives s’expriment de mieux en mieux a travers les instruments d’une expérience communautaire qui commence a murir.
Ces progrès sont, cependant, en grande partie l’effet de l’action du reste du monde (bailleurs de fonds, pays amis et ONG internationales) et peu perceptibles tant la détresse, la pauvreté et l’ignorance restent le lot de la grande majorité des populations. L’Etat national n’a pas bien joué son rôle régulateur et ceux qui ont le plus profité de ses largesses donnent peu en retour. Les injustices structurelles et les grandes inégalités dans la répartition des richesses rendent nos compatriotes anxieux, pessimistes et peu confiants dans leurs capacités de développement, avec cette propension croissante, au chacun pour soi et au sauve qui peut. Pire, la haine de l’autre habite désormais les esprits suite à l’effet conjugué de l’exclusion, l’ignorance, l’injustice et la pauvreté. Il est temps de prendre conscience de ce phénomène et d’agir avant qu’il ne soit trop tard.
Plus que tout, la Mauritanie a besoin d’un leadership qui montre a ses citoyens que ce qui les unit est plus fort et plus durable que ce qui les sépare, non pas par cette traditionnelle langue de bois qui vide les mots de leur sens mais par des actes forts qui les mettent devant leurs responsabilités individuelles et collectives et les incitent à s’instruire, produire, servir et aimer.
La Mauritanie souffre, victime d’un mal qui peine à se dissiper, une gouvernance couteuse sans vision claire qui offre peu de services au commun des citoyens et permet a une minorité de s’accaparer les richesses par le truchement de la prébende, de la corruption et des passe-droits. Les Gouvernements successifs démocratiques ou non n’ont jamais attaqué ce mal par la racine. Ils ont laissé se développer une culture de l’impunité et de laisser aller qui favorise le gâchis et la récidive. La lutte contre la gabegie, l’un des principaux chantiers du Gouvernement actuel donne déjà des signes d’essoufflement et connaitra probablement le même sort que toutes les campagnes qui l’ont précédé. Le pays ne peut cependant continuer dans sa trajectoire traditionnelle sans connaitre un démembrement certain sous le poids des forces centrifuges de l’extrémisme et de la criminalité.
Une réflexion sérieuse doit se concentrer sur les voies et moyens d’améliorer la gouvernance de ce pays en commençant par évaluer l’utilité et la pertinence de ces multiples institutions constitutionnelles et ces structures administratives qui se superposent les unes sur les autres, engloutissant des ressources financières, humaines et matérielles énormes dont le redéploiement sur des secteurs prioritaires comme l’éducation et la sante parait d’une extrême urgence. Dans le cadre, le plus bénéfique des changements serait de modifier la constitution.
La Mauritanie n’a jamais eu de constitution au vrai sens du terme. Le texte qui tient lieu de loi fondamentale a été promulgué dans un contexte politique ou l’homme fort de l’époque voulait se donner une façade démocratique sans en payer le prix réel, en termes d’alternance et de partage d’autorité. Il a demandée a ses conseillers de lui produire un texte qu’il a fait voter par le peuple a travers un processus unilatéral qui n’avait prévu aucune place pour le débat, le dialogue et la négociation entre les forces politiques et les organisations de la société civile. Le produit manquait d’originalité, ses rédacteurs se sont limités à copier la constitution de la cinquième république française, à la virgule prés.
La constitution de 1991 n’en a pas été une. Elle a été acceptée par défaut, faute de mieux mais ses atteintes répétées par ceux-là même qui sont sensées la protéger ont fini par la vider de tout contenu. Personne ne l’a défendu quand le coup d’Etat d’Aout 2005 l’a rendu caduque. Les principales institutions qui en tiraient leurs légitimités ont été dissoutes par un conseil d’officiers supérieurs. Les amendements qui lui ont été apportées en 2006 l’ont été suivant le même procédé, toujours dans l’ignorance qu’un texte d’une telle valeur doit nécessairement refléter les aspirations profondes (et les meilleurs moyens de les satisfaire) des populations exprimées a travers des représentants élus suivant des procédures libres, justes et transparentes. Quand en 2008, est déposé le premier Président démocratiquement élu de la RIM, a la surprise et a la déception du reste du monde, l’appel au respect de la constitution ne trouve pas d’échos ni dans les masses populaires tant le texte parait éloigné de leur préoccupations, ni dans l’élite et particulièrement les élus qui ont fait peu de cas d’un texte duquel pourtant ils tirent la légitimité de leur mandat. Le conseil constitutionnel a trouvé les artifices qu’il faut pour répondre au besoin de l’homme fort du moment. N’eut été les pressions de l’Occident et les menaces de tarissement d’une aide internationale qui maintient le pays sous perfusion et permet a l’élite de se la couler douce, personne n’aurait parlé d’ordre constitutionnel et le FNDD n’aurait certainement pas existée en tout cas pas sous cette forme dynamique et vocale qu’on lui a connu pendant un an.
Rien dans les usages et les principes n’empêche le Président de la République d’avoir sa constitution, taillée sur mesure comme celle qui l’a précédée mais elle n’aura ce caractère transformationnel et futuristes propres aux textes fondateurs que si elle exprime les aspirations profondes du peuple à travers les opinions bien élaborées de ses représentants élus suivant des procédures justes et transparentes. Un tel scenario parait peu envisageable à l’heure actuelle compte tenu de la fragmentation de la classe politique, l’absence d’une volonte de dialogue sur les questions de fonds, et les pauvres performances en termes de respect des engagements et de la parole donnée sur les cinquante dernières années.
Le Président de la République ferait toutefois œuvre d’utilité publique si au moins il nous débarrasse d’un texte qui coute cher à la collectivité sans lui fournir les garanties traditionnellement établies en termes de séparation des pouvoirs et de protection des droits. Il pourra le remplacer par une charte sur l’honneur qu’il s’engage à respecter et à faire appliquer. Ce n’est pas le plébiscite populaire qui va manquer. Chacun des trois pouvoirs constitutionnels sera limité à une seule entité, exit du Premier ministère, du Senat, du Conseil constitutionnel et de la cour des comptes. La création des structures consultatives comme le Conseil Economique et social et le Conseil supérieur Islamique et exécutives comme les départements ministériels devraient relever du domaine de la Loi pour donner aux législateurs le moyen d’un contrôle plus effectif de l’exécutif. Une simplification qui permettra aux citoyens de voir plus clair dans le fonctionnement de leur Etat et surtout arrêter cette prolifération des structures génératrice d’incohésion et d’inefficacité.
Si le Président de la République veut réellement rompre avec le passé, le chantier constitutionnel est bien plus intéressant et certainement moins émotionnellement destructeur que de toucher au drapeau national.